Le Conseil d’État vient de juger que l’administration fiscale française ne pouvait pas limiter le montant de la retenue à la source française sur les plus-values réalisées par des actionnaires non résidents sur des participations substantielles dans une entité résidente française.
La Haute Cour, estimant que le traitement français de la retenue à la source n'était pas compatible avec le droit de l'UE et était contraire à certaines libertés de l'UE, a conclu que la retenue à la source devait être intégralement remboursée.
D'une manière générale, en droit français, les plus-values réalisées par les sociétés résidentes lors de la cession de filiales sont généralement soumises à l'impôt sur les sociétés. Une exonération de 88% s'applique toutefois aux gains sur la vente de certaines participations si elles sont détenues pendant plus de deux ans et sous réserve de certaines autres conditions.
Les sociétés non résidentes qui vendent des actions de sociétés françaises sont soumises à l'impôt français (au taux normal de l'impôt sur les sociétés français, actuellement 28% (article 244 bis B de la loi fiscale française) si la participation dépasse, ou dépasse à tout moment cinq années précédentes, un seuil de 25%.
Afin de rendre cette législation nationale française compatible avec le droit de l'UE, la documentation administrative française (BOI-IS-RICI-30-20-01 / 08/2018) permet aux sociétés mères résidant dans un autre État membre de l'UE de bénéficier de la participation française exemption, à condition que certaines conditions soient remplies.
Plus précisément, ces sociétés peuvent demander un remboursement partiel de l'impôt sur les plus-values retenues - égal à la différence entre l'impôt dû par les sociétés non résidentes et le montant de l'impôt sur les sociétés français qui aurait été appliqué sous le régime d'exonération des participations si le vendeur avait été un Entité résidente française - laissant la charge fiscale finale à environ 3,36% (28% multiplié par la partie imposable de 12%).
Au cas particulier, le contribuable - une société résidente fiscale en Italie - a vendu sa filiale française et a demandé le remboursement intégral de l'impôt sur les plus-values en France.
La cour d'appel avait estimé que les dispositions législatives françaises enfreignaient la liberté d'établissement et la libre circulation des capitaux de l'UE car, en vertu de cette mesure de droit fiscal français, les sociétés non résidentes de l'UE sont imposées sur une base différente par rapport aux règles fiscales applicables aux vendeurs résidents français. .
Toutefois, la cour d'appel a estimé que l'administration fiscale n'avait pas autorisé à juste titre le remboursement de la partie d'impôt correspondant à ce qui aurait été payé par un vendeur résidant en France.
Le Conseil d’État a conclu qu’étant donné que la retenue à la source nationale française sur les plus-values était incompatible avec le droit de l’UE, les autorités fiscales françaises ne pouvaient pas se fier à leurs propres doctrine administrative pour n’accorder qu’un remboursement partiel. La Haute Cour a en outre estimé que le contribuable avait droit à un remboursement intégral de la retenue à la source française.
En pratique, pour les montants de retenue à la source français déjà payés, il semble que les résidents de l'UE auraient le droit de demander un remboursement du montant total de la retenue à la source payé sur la vente de participations éligibles françaises depuis 2018 (à condition que la demande de remboursement soit déposée avant le 31 décembre 2020). En outre, les contribuables impliqués dans une procédure judiciaire de remboursement de précompte mobilier pourraient invoquer la décision du Conseil d’Etat dans leur litige en cours.
Une demande de remboursement de la retenue à la source peut également devoir être envisagée dans les situations où les sociétés mères sont résidentes d'autres États membres de l'UE qui ont conclu une convention fiscale avec la France - une convention fiscale qui prévoit un droit d'imposition sur les plus-values réalisées sur des participations importantes attribuées à la France (par exemple, les conventions fiscales avec l'Autriche, l'Italie, l'Espagne et la Suède) ou dans un autre État membre de l'UE qui n'a pas de convention fiscale avec la France (comme le Danemark). Une extension potentielle de cette possibilité aux sociétés mères résidant dans les États membres de l'EEE (comme l'Islande ou le Liechtenstein) peut également devoir être envisagée.
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